Nancy Huston, auteur française d'origine canadienne comme elle aime à se décrire, a enchanté le public venu nombreux l'écouter au Pavillon malgré le froid et la pluie. Ce premier rendez-vous du 2 février 2018 de l'année a débuté par une lecture d'extraits de "Sensations fortes" par l'auteur lui-même, moment d'intense partage avec le public comblé par le talent de cette lectrice hors-pair.
Dans ce petit recueil de 9 nouvelles écrites entre 1975 et 1997, publié par Actes Sud dans la collection Essences , Nancy Huston retrace de simples moments d'une vie, décrit des sensations ayant procuré une émotion ou un souvenir, prenant en toile de fond des tranches de vie personnelle mais aussi des événements majeurs comme la chute du mur de Berlin. L'auteur d'aujourd'hui revient sur ces textes écrit dans sa jeunesse où l'écriture d'autrefois lui semble plus particulière, plus incisive. On y retrouve les thèmes et les questionnements récurrents à l'oeuvre de Nancy Huston, tels que la langue, l'identité, le corps....
Dans la nouvelle "Nord perdu", elle aborde le pays de son enfance tandis que dans "Place numérotée", nouvelle écrite en 1982 pendant sa maternité, elle rend hommage à la femme, aux femmes, à leur beauté, à l'insécurité dont elles sont victimes voire à leur persécution : texte qui fait écho à l'actualité.
Dans la préface de "Naissance d'une jungle", quant Eric Fottorino décrit Nancy Huston comptant parmi les "auteurs exigeants qui choisissent d'intervenir seulement quand ils sont convaincus d'avoir vraiment quelque chose à dire", il dit d'elle, qu'elle aborde un sujet "sans concessions, sans chercher à plaire, peut-être même avec la conscience aiguë qu'elle pourrait déplaire". Le lecteur peut voir là, la définition d'un auteur engagé, adjectif dans lequel Nancy Huston ne semble pas se reconnaître. Pour elle, ses auteurs fétiches, les auteurs dont l'engagement est réel sont Romain Gary dont elle rêverait avoir écrit ""la vie devant soi", Jean Berger mais aussi et surtout Arundhati Roy, écrivaine indienne connue pour "Le dieu des petits riens", qui a milité toute sa vie pour l'écologie et les droits humains. Selon Nancy Huston, l'engagement ne se traduit pas seulement par le message politique, mais le roman avec sa force a vocation à comprendre le monde, le mal et permet de faire ressentir de l'empathie pour des personnages peu sympathiques au demeurant.
Au cours de la soirée, l'auteur a parlé de son travail d'écriture, pour elle, c'était une nécessité d'écrire. Tout d'abord, dans son enfance, elle devait répondre aux lettres de sa mère qui avait abandonné sa famille, elle devait correspondre pour maintenir coûte que coûte un contact avec cette mère absente. Par la suite, son premier livre "Les variations Goldberg", lui procure une véritable exaltation, une euphorie , rédigeant plusieurs chapitres par jour. C'est à l'occasion de de "Cantique des plaines" en 1993, que Nancy Huston écrit dans sa langue natale et se contraint ensuite à la traduction de son texte. La double écriture permet selon elle de corriger les imperfections de style, de s'attacher au rythme et à la musique des mots. L'écriture dans sa langue maternelle l'oblige à plonger au fond de son histoire personnelle, à affronter les épreuves. Pour Nancy Huston, ce qui permet de créer une oeuvre, ce sont les obstacles : "sans obstacles dans la vie, il n'y a pas d'oeuvre". Elle fait la confidence aux lecteurs de la publication dans l'année de son prochain livre, une autobiographie dans l'esprit de "Bad girl, classe de littérature".
La soirée s'est terminée, comme elle avait commencée, par une lecture de l'auteur avant la longue séance de dédicaces et autour du pot de l'amitié.
Ecoutez un extrait de la rencontre du 2 février 2018 à Lit-et-Mixe :
Enregistrement réalisé par Anthony Bacchetta avec le soutien de la
Retrouvez les livres de Nancy Huston dans les médiathèques des Landes :