Marie-Hélène Lafon étaient à Saint Julien en Born. C’est un livre de Richard Millet « La gloire des Pytre » qui l’a mise au pied du mur de l’écriture mais c’est « un Cœur simple » de Flaubert et les silences de Félicité qui restera son livre de chevet, son bréviaire même…
Marie-Hélène Lafon, petit bout de femme pétulante et coquette, a conquis le public de sa voix puissante et obstinée. Avec passion et émotion, elle a revendiqué ses origines paysannes venues du rude Cantal où elle a désormais sa maison de vacances, à 15kms de la ferme familiale.
Elle aime écrire à partir du « terreau des origines », elle veut porter témoignage d’un monde, d’un territoire qui revient dans ses romans d’une manière obsessionnelle. Comme Raymond Depardon dans « Profils paysans », à qui elle a dédié son second roman « Liturgie », elle peint « un monde paysan qui n’en finit pas de finir et de se réinventer», ses personnages sont seuls et silencieux, la question du plaisir n’a pas lieu d’être chez eux, l’âpreté étant la seule réalité… Citant Fellini, elle nous dira « je suis toujours autobiographique même si je parle d’un poisson » et j’aime l’idée « d’être l’héritière d’un maquignon », tous mes livres partent du réel , « je ne suis pas une raconteuse d'histoires, je n’invente rien mais je réinvente tout ».
Prix du style en 2012 pour son roman « Les pays », Marie-Hélène Lafon est très attachée aux mots, à la langue, au phrasé.
Les phrases la « traversent… », elles sont comme « des clôtures avec des fils barbelés » pour lesquelles il faut trouver « la bonne tension ». Le réglage de la phrase se faisant par la ponctuation. Elle n’utilise jamais le point de d’interrogation ou d’exclamation, elle ne les « supporte pas d’une manière physique », le point de suspension est réservé à Céline ; par contre comme Flaubert, elle abuse du point virgule. Elle nous dira aimer les coulées de verbes et d’adjectifs qui empêchent de respirer ; les « gros mots rares » que l’on doit aller chercher dans le dictionnaire comme « atermoiement », « immarcescible », les mots désuets comme « sempiternel » qui mettent un soupçon de préciosité. Pour les verbes, sa préférence va aux subjonctifs et au conditionnel qui « élargit les possibles ».
Pour répondre à la question d’un lecteur, elle avouera que les écritures qui l’ont marquée sont masculines (Flaubert, Céline, Faulkner, Bergounioux, Michon, Millet) et nous dévoilera son dernier coup de cœur pour « Louvière » d’Alain Galan, un roman sur la sauvagerie que chacun porte en soi et qui parle d’une manière éblouissante des choses qui relèvent de l’intime.
Mille mercis Marie-Hélène Lafon pour cette belle soirée en votre compagnie…